Une terrible épidémie de peste a durement frappé le comté du Gévaudan de 1720 à 1722...
Henry MOUYSSET la raconta - avec talent, sobriété et un zeste d' humour - aux très nombreux auditeurs lors de sa conférence du 7 octobre 2020 ; il en évoqua avec précision la chronologie, les tâtonnements du corps médical, les mesures prises par les autorités royales et ecclésiastiques, les conséquences sociales et économiques tout autant que les peurs et les croyances ; cartes, graphiques, documents d'archives venant en illustrations nombreuses ...
Et puis, cette question sous-jacente : pourrait-il y avoir quelques similitudes avec la Covid-19 apparue en 2020 ?
Henry MOUYSSET, auteur du livre " La Peste en Gévaudan 1720-1722 "
La peste est entrée en Gévaudan dans le village de Corréjac, dans l'ancienne paroisse de Salmon, proche d'Auxillac.
Jean QUINTIN , un journalier, le premier pestiféré - "le patient 0" comme on dirait aujourd'hui - y décède le 26 novembre 1720 . Il était tombé malade trois jours auparavant, lors de son retour de la foire de la Saint-Clément , à Saint-Laurent-d'Olt.
Le mal contagieux fait ses premiers morts à Corréjac, décimant d'abord la famille Quintin, avant de gagner par des membres de cette famille, le bourg de La Canourgue.
Plan de l'enciente du blocus autour de La Canourgue et de Corréjac, dressé les 2 et 3 juin 1721
(cf. page 39 " La Peste en Gévaudan 1720-1722 ")
Le fléau tourne dans le centre du Gévaudan pendant deux années. Il emporte ses dernières victimes à Mende les 11 et 12 décembre 1722, au terme de plusieurs cas échelonnés cette même année, après le pic de l'automne 1721, ces "étincelles" de la maladie redoutées par les autoriités alors qu'elles la croyaient éradiquée.
Carte des paroisses gévaudanaises contaminées (cf. page 190 " La Peste en Gévaudan 1720-1722 ")
En deux années, de Corréjac à Mende, la marche sinistre de la peste a tué environ 5 500 Gévaudanais. [ bilan obtenu en croisant les chiffres des décès donnés par Jean-Baptiste L'Ouvreleul, le commandant De La Devèze et l'intendance du Languedoc]
La malade a sévi très durement à La Canourgue, Marvejols et Mende.
Le commandant De La Devèze dénombre ainsi dans son "Mémoire sur la peste" :
* La Canourgue : 853 décès ; la paroisse a perdu plus de 60% de ses habitants avec une explosion de l'épidémie durant l'été 1721.
* Marvejols : 1596 décès ; ravagée par la peste d'aiût 1721 à avril 1722, la ville a perdu plus de la moitié de sa population.
* Mende : 1049 décès ; attaquée en septembre 1721 et où la peste disparut en dernier (décembre 1722) , la cité-capitale du Gévaudan a perdu près d'un tiers de sa population...
* Les paroisses d'Ispagnac, La Capelle et Quézac connurent aussi cette haute mortalité.
Page extraite du livre de raison d'Étienne Veyron, témoin de la peste à Marvejols
(cf. page 105 " La Peste en Gévaudan 1720-1722 ")
La grande mesure d'Etat fut le "blocus" du Gévaudan décidé à Florac en août 1721. Des "lignes" sont positionnées aux frontières de la province. Elles sont éloignées des lieux infectés pour que les soldats ne soient pas trop exposés, tout en interdisant fermement la sortie du comté sous peine de mort .
Le passage des personnes et des marchandises est contrôlé aux "barrières" - véritables "check-points" - : il faut disposer de laissez-passer pour pouvoir se déplacer. Toutes ces "lignes" mobilisèrent une dizaine de milliers de soldats et de miliciens.
Elles eurent un fort coût financier. Le jeune roi Louis XV en ordonna la levée, et donc donc du blocus du Gévaudan, le 1° décembre 1722 alors que celui spécifique de sa capitale- Mende - fut seulement levé le 15 janvier 1723.
Face à "la maladie contagieuse" [ le mot "peste" ne fut employé que très tardivement ] , le corps médical met en oeuvre tous les moyens connus à l'époque : remèdes et parfums concoctés essentiellement à base de plantes, cordiaux pour provoquer la transpiration, saignées, lavements, extraction ou incision des bubons ( qu'il faut opérer arrivés à mâturité), scarification des charbons...
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Schéma du processus d'épidémisation (cf. page 163 " La Peste en Gévaudan 1720-1722 ")
Le récit d'Henry Mouysset répondit - en filigrane - à la question sous-jacente ...
Les comportements des autorités locales et royales , du corps médical, des militaires de l'époque mais aussi des Gévaudanais eux-mêmes tout comme l'atmosphère anxiogène entourant cette épidémie présentaient bel et bien de grandes similitudes avec ce que l'on observe aujourd'hui face à la Covid-19...
... L'Histoire ne serait-elle qu'un perpétuel recommencement ?
Le livre d'Henry Mouysset La peste en Gévaudan 1720-1722 est disponible chez l'auteur ( Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. )
© CER BB . Octobre 2020.