Une antifasciste au camp de Rieucros
Il s'agit là du titre d'un ouvrage paru, en octobre 2019, aux Editions Le Bousquet-Labarthe, à l'occasion du 60° anniversaire de l'ouverture du camp de Rieucros à Mende.
Ce texte est un extrait (une quarantaine de pages) de "Rivoluzionaria professionale" de Teresa Noce, communiste italienne internée dans le camp de juin 1940 à juin 1941.
Baraquements. Octobre 1941 Hiver. Femmes internées devant leurs baraquements
Bernard Vanel - le conférencier - a traduit ces pages inédites en France. Il a commencé son exposé par la présentation du site de Rieucros, lieu de promenade bien connu des Mendois, rappelant que dans les années 70, le château de Rieucros hébergea la centre aéré de la paroisse de Mende.
Mais, le nom de Rieucros renvoie aussi à cette époque où furent internés, dans des baraquements, des hommes d'abord (les brigadistes de la guerre civile espagnole (février / octobre 1939) puis des femmes (octobre 1939 / février 1942) considérées comme "indésirables", antifascistes ou détenues de droit commun.
Ramassage de bois pour se chauffer.
Fut ensuite narré le parcours de Teresa Noce...
Née à Turin en 1900, elle dut , très tôt, quitter l'école afin d'aider les siens , sa mère vivant seule avec elle et son frère. Elle participa avec les couturières, en 1911, à sa première grève. Elle devint ensuite ouvrière à la Fiat Brevetti.Elle y développa , au contact des syndicalistes, sa conscience politique. A l'âge de 15 ans, elle manifesta contre l'entrée de l'Italie dans la première Guerre mondiale.
En 1921, Teresa Noce s'inscrivit au Parti Communiste où elle rencontra Luigi Longo, son futur mari, dont elle eut trois enfants. Activiste, partisane, elle sillonna, dans son combat antifasciste , l'Union Soviétique et l'Europe. Elle combattit pour la liberté pendant la guerre d'Espagne sous le nom d'Estella.
Teresa Noce connut l'enfermement au camp de Rieucros de juin 1940 à juin 1941. Arrêtée par la Gestapo en 1944, elle fut déportée à Ravensbrück puis à Jolleischen. A la fin de la guerre, elle fut libérée par les partisans polonais.
Dès son retour en Italie, elle fit partie des 21 députés de l'Assemblée constituante et de la Commission des 75 qui rédigea la Constitution italienne.
Elle fut à l'origine de la loi sur la protection des mères travailleuses. Journaliste et écrivaine, elle publia plusieurs livres parmi lesquels "Révolutionnaire professionnelle" dans lequel elle évoque son séjour au camp de Rieucros...des pages qui apportent un nouveau regard sur le quotidien de ces femmes internées là.
Elle mourut le 22 janvier 1980 à Bologne.
Nouvel An 1942. Déguisements "Provinces françaises"
Des compléments d'informations sur le camp de Rieucros furent aussi apportés au cours de cette conférence par Mesdames Anne-Marie SAVAJOL-ARTÈS et Mado.DESHOURS.
* La première présenta "Pour le souvenir du camp de Rieucros " dont elle est la nouvelle présidente. Cette association oeuvre - depuis 1992 - pour "perpétuer le souvenir des souffrances des interné-e-s mais aussi étudier les causes qui ont mis en place un tel camp dans un passé si proche."
Elle fait sienne la phrase d'Elie WIESEL : "Il n'y a pas d'avenir sans mémoire"
* Des questions ayant fusé pendant l'exposé , ce fut Mado Deshours qui ( au pied levé) y répondit : le nombre de femmes ? en juillet 40 : 570 femmes et 42 enfants / les nationalités ? 27 / les repas ? topinambour, rutabaga, viande parfois avariée... / les premiers internés ? une centaine d'hommes / Comment ce camp était-il vu par la presse locale ? "La Croix de Lozère" s'est véritablement déchaînée surtout sur les hommes ; le journal "La Cévenne républicaine" fut beaucoup plus pondéré...
Elle a, ensuite, conseillé l'achat du livre tout en émettant quelques réserves personnelles. En effet, le point de vue de Teresa Noce , stalinienne, est intéressant mais son attitude vis-à vis des autres, sa façon de les considérer et ses actions au camp ( avant elle, le camp s'était organisé, les colis se partageaient ) lui paraît quelque peu "contestable".
© Les photos du camp de Rieucros nous ont été très aimablement transmises par l'association " Pour le souvenir du camp de Rieucros". Merci !